03 juillet 2006

Le Chêne de Vérité

A tous ceux que j'ai blessés... Merci Péricles.

Allongé à l'ombre d'un chêne plusieurs fois centenaire, la brise m'a soufflé ses vérités. Les paroles qu'elle n'a pas dites, le vieil arbre me les a faites comprendre, juste de son immobile majesté.

Son tronc, énorme, aux courbes toutes nouées m'a ouvert les yeux. Je suis aveugle et pourtant ce géant au feuillage hirsute m'a fait voir ses trésors cachés. Il n'est pas arrivé du jour au lendemain. D'un gland, fruit de la connaissance qui aurait pu nourrir une laie ou trois sangliers, il est apparu, puis lentement s'est extirpé.

Le souffle coléreux du vent, les flots ravageurs de mille pluies n'en sont pas venus à bout. Patiemment, pouce après pouce, il s'est développé. Il a grandi et après chaque saison, plus profondément, a enfoncé ses racines. Chacune d'entre elle a plongé dans cette terre que ses feuilles ont nourri de leur automnale putréfaction. Tous les jours, siècles après années, ces petits tentacules végétaux se sont étendus, asseyant un peu plus l'arbre dans sa splendeur. Les pièges que les pierres tendaient ont été déjoués, contournés avec une patience toute sylvestre.

Les branchages se sont déployés, révélant leur manteau d'émeraude à la parure sans égale, couvrant le sol d'une ombre bienfaitrice. Chaque ramure a pris le temps de s'étendre, un peu plus loin sur les côtés, un peu plus haut vers le ciel, offrant leur solidité aux pies, leur amitié aux pigeons et aux corneilles.

Le tronc est tordu, d'un diamètre admirable, veiné de myriades de sillons qui content l'histoire du monde. Combien de générations sont passées devant ce magistral titan ? Combien de couples se sont aimés sous ses bras accueillants et protecteurs ? Combien de cerfs et leurs compagnes au pelage si doux sont venus s'y frotter ?

Je ne le sais, je ne saurai l'imaginer. Ce que je sais c'est que ce vénérable vieillard m'a parlé. Il ne m'a rien dit, il m'a juste fait comprendre. Il est là, il est beau et fort, robuste comme un menhir de bois qui chante sa douce complainte sous la lune, les étoiles, et subit la caresse du soleil. Maintenant je sais que ma vanité fait de moi un être misérable, sa splendeur est là pour me le rappeler. J'ai compris quelle créature méprisable je suis, couvert d'orgueil alors que lui est une parure divine sans lest de suffisance inutile. Merci à toi l'arbre, merci à toi, ô Chêne de Vérité.

Oui, c'est bien vrai, cet arbre est sacré, les Druides y ont cueilli le gui, les assassins et les brigands y ont été pendus après que les rois, à ses pieds, aient rendu justice. Aujourd'hui je fais amende honorable, je suis coupable. A tous veuillez excuser la bêtise et la méchanceté, j'étais aveugle, j'étais sourd. Maintenant, agenouillé devant ce souverain à la couronne de jade, sans attendre de pitié, j'implore votre pardon.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Un texte émouvant, cher Helgui.

E.